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[Tiriel/Ibräm] De la culpabilité.

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[Tiriel/Ibräm] De la culpabilité. Empty [Tiriel/Ibräm] De la culpabilité.

Message  Tiriel Mer 4 Nov - 6:34

[Partie 1, cinq ans plus tôt: La Croisée de Corin]

L'air était lourd. Le sol luisait, détrempé, couvert de rigoles vermillon. Partout autour, la corruption s'étendait, quelques taches d'herbe d'un vert éteint s'accrochant péniblement à leur vie, au milieu de l'océan de plantes aux couleurs maladives qui couvrait la lande. Derrière, le village, parcouru d'une agitation fébrile et angoissée. Ils étaient tous massés à l'entrée du village, dans les armures qui quelques heures plus tôt étaient encore resplendissantes d'or et d'acier, tabard azur et argent porté fièrement, rougis par la pluie. La pluie.

Le sang tombait du ciel torturé, en gouttelettes fines. Conjuré par les sombres nécromanciens du Fléau, leurs incantations leurs parvenaient par moment, étouffées, portées par le vent, charriant au passage l'odeur de la pestilence omniprésente en ces terres. Ils étaient coupés de la Chapelle, seul lieu encore pur des environs, vaillamment défendue par d'autres frères de la Main d'Argent. Ils étaient acculés, et devaient défendre le village aussi longtemps que possible contre les troupes non-vivantes pour permettre aux civils de s'échapper. Chacun de ceux qui tombaient se relèveraient pour servir l'ennemi, ils le savaient, mais beaucoup plus y passerait sans le sacrifice des soldats.

Tiriel se tenait derrière la ligne principale, dans son armure sobre et légère d'écuyer. Devant lui, Esterar, le paladin qu'il servait, celui qu'il soignerait dans la bataille à venir, utilisant ses pouvoirs naissants pour refermer ses plaies à mesure qu'elles apparaitraient et prévenir la corruption qui risquait de s'infiltrer par chaque blessure. Il était anxieux. Il allait au combat pour la première fois, et du haut de ses vingt-trois ans, il n'en menait pas large. Son frère ainé l'observait, souriant, confiant. Anselios, malgré ses vingt-six ans tout juste passés, avait réussi à se hisser au rang de capitaine. Il paraissait plus vieux, plus fatigué, ces derniers temps. Le bouc toujours bien taillé, les cheveux retenus loin du visage par une cordelette de cuir passée autour du crâne, il irradiait littéralement de confiance en temps normal. Ses yeux légèrement plissés trahissaient à présent sa fatigue.

Souriant timidement en retour à son frère, Tiriel baissa les yeux, une impression étrange dans les jambes. Le sol tremblait, il en était sûr. Les autres devaient l'avoir senti aussi, car ils remuaient tous inconfortablement, se replaçant, libérant les épées de leur fourreaux, raffermissant leur prise sur leurs marteaux et pavois. Ils arrivaient, les créatures du Fléau. A travers le rideau carmin de la pluie sanglante, ils voyaient les formes avancer. Les premiers rangs apparaissaient de plus en plus clairement, constitués de marionnettes cadavériques, macchabées fraichement relevés de leur tombe, la chair à canon. Derrière, les masses indistinctes des horreurs raccommodées gargantuesques avançait pesamment.

Les yeux de Tiriel se refusaient à suivre leurs formes, parcourues de magie nécromantique. Leurs trop nombreux membres et appendices se mouvant de façon obscène, menaçant de soulever son estomac à chaque instant. S'accrochant aux derniers conseils prodigués par son frère aguerri, Tiriel concentra son regard dans le vague, refusant à son esprit la recherche de visage connus dans la horde qui s'approchait. Trop près, ils étaient trop près de l'endroit où tous deux étaient nés, la tentation était trop grande.

***

Plus le temps de réfléchir. Le fracas assourdissant des armures martelées emplit l'air. Des premiers rangs deux-fois-nés jaillissent des geists, sombre pantins morbides à l'œil unique et à la détente fatale. Ils tombent comme la pluie rouge du ciel, et leur but est clair: Tiriel et ses compagnons soigneurs. Réflexe, il rabat son pavois par dessus sa tête. Un choc. L'odeur du chancre lui emplissant les narines, il baisse les yeux, voit une moitié de corps impie percuter le sol devant ses pieds, l'éclaboussant de sang et de liquides infâmes et bilieux.

Un regard par dessus le bouclier. Le chaos, partout. Esterar est déjà au sol, la moitié du visage vaporisée par l'acide. Une des horreurs massive, aucune chance. Autour, la chair rencontre l'acier, tantôt putréfiée ou saine, découpée de la même façon, explosée par les marteaux. Droite. Un bras pâle et couvert de pustules. Coupé, les fluides abjects s'écoulent de la blessure, mais le mort continue. Crocs en avant, utilisant son corps comme bélier. Une incantation soudaine, d'une voix puissante. Le cadavre explose dans une gerbe de flammes sacrées. Le vert sale et immonde de ses entrailles consumé dans une lumière aveuglante. Tiriel relève les yeux, Anselios lui adresse un sourire en coin sans vraiment le regarder. Pas le temps pour ça, la mêlée fait rage.

Reprenant confiance, Tiriel se met à incanter à son tour. L'énergie afflue dans ses mains, conscience focalisée sur son frère. Ses éclairs de Lumière fusent, les plaies du capitaine se refermant petit à petit. Sa voix s'assure, se fait plus forte. Une horreur, face à lui. Anselios à ses côtés. Un coup, un sort. Les deux se battent comme des lions. Des ouvertures béantes constellent le béhémoth putride, à leurs pieds le sol n'a plus de terre que le nom. Leurs bottes trempent dans la vase ignoble dont la couleur défie les lois de la nature. Des éclairs d'énergie d'un bleu maladif parcourent la bête, le sol, tentant de les frapper. Les frappent. Les pustules turgescents dues aux brulures impies apparaissent sur leurs bras. Tiriel incante, tente de dissiper la maladie et la magie tant bien que mal. Anselios, dents serrées, le repousse en arrière, s'interpose entre lui et le raccommodé.

La masse les sépare. Son frère est entouré d'énergie sacrée. Chaque coup du golem semble être arrêté par une barrière de lumière. Il est mal en point, pour avoir utilisé cette technique. Tiriel redouble d'effort alors que la bulle s'effondre. Il tente de se rapprocher. Un choc, dans son dos. Il tombe, face contre terre. Le liquide au sol lui pénètre la bouche et les narines. Il suffoque. On le tire en arrière. Ses frères d'arme, babines retroussées, le tirent en arrière. Il faut se replier, disent-ils. Les civils sont évacués, ils n'ont plus rien à faire là. Il leur crie de le laisser, la gorge enflammée par les immondices dégoulinnants qui recouvrent sa figure.

***

Anselios se débattait toujours, vaillamment, et pour chaque blessure qu'il recevait, le géant obèse et recousu en recevait trois. Mais ce n'était pas assez. Tiriel devait l'aider. Mais il ne le pouvait pas. Il était trainé, il pleurait de rage. Anselios l'appelait, lui et ses compagnons, leur disant de ne pas abandonner leurs terres au chaos et à la peste, de ne pas l'abandonner, lui-non plus, car il restait de l'espoir. Mais ils s'éloignaient, inexorablement. Un flash. Une des lames rouillées et gangrenées venait de s'abattre. Une ultime fois. Anselios disparu sous la masse grouillante, le torse ouvert.

Son dernier cri résonnait encore aux oreilles de Tiriel, d'Ibräm, cinq ans plus tard. Il venait de se réveiller, en sueur. Et le cri d'Anselios, voyant la lame arriver sur lui, tournait toujours dans ses oreilles. « Soyez maudits ».

Tiriel
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Message  Tiriel Mer 20 Jan - 14:36

[Partie 2 : Quelques mois plus tard]

Ils méritaient de le voir, de savoir, il devait leur rendre cet hommage. C'est avec cette pensée sombre mais résolue en tête que le jeune homme avançait. Epoussetant sans cesse le moindre grain de poussière imaginaire se déposant sur son tabard et son armure neuve, le jeune Paladin Tiriel Nearemion cheminait au dos de son destrier sur une route de terre d'Alterac. Autour de lui, devant et derrière, ses compagnons du convoi, ses frères, tous en route pour un pélerinage. La route les ferait passer par les montagnes, par la dernière ville sur la route d'Andorhal, Strahnbrande, où la peur s'installait de jour en jour, les malandrins du syndicat se faisant plus opressants.

Ils venaient de quitter le bourg et son atmosphère si lourde et s'avançaient précautionneusement vers le pays connu désormais sous le nom de Maleterres. Leurs pays, en fait, Loardaeron. Ils se rendaient au tombeau d'Uther Porteur-de-Lumière, le fondateur de la défunte Main d'Argent l'ancien ordre des Paladins. Non loin d'Andorhal. Sa ville natale. Ils allaient rendre hommage à cet homme qui avait donné sa vie pour la Lumière, et peut-être poursuivre ensuite plus avant dans les terres contrôlées par le Fléau des morts-vivants, jusqu'au repos de l'Archevêque Alonsus Faol, guide et mentor d'Uther.

Tiriel tentait d'occuper son esprit avec ce plan de route, déployait tous les efforts de sa conscience pour ignorer les changements de paysage autour de lui. Il avait déjà vu les Maleterres, il avait combattu à la Croisée de Corin, plus à l'est... Non, pas la Croisée. Il détourna une fois de plus ses pensées de ce lieu qui hantait désormais sa mémoire. Le paysage l'y ramenait. Les plantes malades, le brun dégoulinant et vomitif de la lande, les arbres suintants... Et la puanteur. L'odeur de chair pourrie, partout. Tout autour de lui le rappelait à cette journée maudite, où le sang avait littéralement plu.

La pointe du Noroit. Ils étaient arrivés au camp de l'Aube d'Argent, comme s'étaient baptisés les derniers survivants en ces terres de la Main. Ils gardaient l'entrée des terres dévastées. Alors que le convoi mettait pied à terre, le tourment de Tiriel ne faisait qu'augmenter. Andorhal. Il n'avait pas revu sa ville depuis plusieurs années, depuis que l'épidémie de peste du Fléau y avait démarrée, propagée au reste du royaume par ses grains, commerce principal de la région. Il devait la voir. Il devait aller jeter un dernier œil à sa maison d'enfance. Il posa la main machinalement sur un paquet épais et allongé, enroulé dans une étoffe immaculée, tournant son regard dans la direction de la ville.

-C'est pour ça que tu l'as amené, n'est-ce pas?

La voix appartenait à un de ses compagnons, son plus fidèle ami et camarade, Denerias Portespoir. Le jeune homme était une masse, taillé pour l'armure, le port assuré. Plus que jamais, il portait son patronyme à merveille, son regard éternellement bienveillant posé sur Tiriel. Il désigna le fardeau de ce dernier du menton, poursuivant.

-Tu voulais les ramener à la maison, n'est-ce pas?
-... Je veux qu'ils aient une sépulture, avec quelque chose d'eux.

Tiriel baissa légèrement la tête, s'apprêtant à descendre de son destrier de même. La main de Denerias sur ses rênes l'en empêcha. Tournant la tête vers son compagnon, il ne put s'empêcher de sourire à l'expression de confiance absolue qui semblait rivée à son visage.

-Ne bouges pas, je vais voir ça avec le Capitaine, nous partons ensuite.

Il regarda le jeune homme s'éloigner après qu'il lui ait adressé un signe de tête reconnaissant, et tourna à nouveau son regard vers la ville. Des fumées s'élevaient encore de ci de là, noires et rageuses de flammes par endroit, vertes et nauséabondes de peste à d'autres. Les bruits immondes de la mort semblaient omniprésents. Les pas mal cadencés d'animaux pestiférés, les gargouillis de plantes en décomposition, le clapotis de bulles éclatant à la surface de l'eau opaque et boueuse de la rivière toute proche.

Le destrier de Denerias choisi ce moment pour venir se placer à ses côtés. Ainsi que ceux de deux autres frères.

-Le Capitaine nous autorise à y aller. Défense d'entrer dans la ville elle-même, par contre, nous longerons les murs pour aller mettre tes présents en terre à hauteur de ton ancienne maison. Elle était dans les faubourgs il me semble, non?
-Oui... Nous la verrons même sans doute. C'est parfait, merci Denerias, tu es un véritable ami.
-Allons, cesses, et en route.

S'ébranlants, les quatre paladins reprirent la route. La ville approchait. Ils passèrent le pont sud, tournant aussitôt après sur la Muraille, les rochers qui servaient de défense naturelle à la cité. Les chevaux peinaient, bien que les hommes en soient descendus et les menassent par la bride. Ils contournaient la ville, comme prévu, et s'arrêtèrent en vue d'une maison délabrée de taille plus que correcte. Une famille aisée avait visiblement vécu ici. Une famille bourgeoise, de marchands prospères. Une famille où le père avait très certainement enseigné à ses fils la Lumière, le respect et la ténacité comme valeurs primordiales, la mère appuyant continuellement sur la compassion. Sa maison, sa famille.

Tiriel ne pouvait pas détacher ses yeux des ruines. Le toit brulé, trois murs vaguement debout, la cheminée portant à peine les restes de l'étage. Certaines décorations semblaient encore présentes dans les murs, malgré la distance qui l'empêchait de bien voir. Refoulant son instinct lui commandant d'avancer vers la bâtisse, il posa le regard sur la main de Denerias qui le tenait par l'épaule. Opinant du chef, il entreprit de déballer son paquetage blanc.

Une épée de bois gravée de symboles, et un livre. Ses rêves d'enfant. Le premier cadeau qu'il se rappelait avoir reçu de son père, qui l'avait taillée et gravée lu-même, ainsi que son livre de contes, que sa mère leur lisait à lui et son frère ainé, et qu'il avait gardé toutes ces années à l'Abbaye, pour se rappeler son pays. Le visage fermé, il les disposa au sol, et posa la main sur la petite pelle qu'il avait amené pour l'occasion. Le bruit des épées brusquement tirées de leur fourreau le fit se retourner.

Cette fois les morts étaient visibles. Et bien debout. Leur démarche chaloupée, le teint blafard, les vêtements maculés de terres et de liquides que l'esprit se refusait à identifier, les bras levés, tout les désignait comme cadavres ambulants. Les bras levés? Quelque chose ne collait pas. Ils ne tendaient pas leur membres vers eux, dans cette pose avide et grotesque des pantins morbides habituels. Les bras étaient levés de part et d'autre de leur corps, dans une pause pacifique, presque de rédition. C'est en réalisant cela que Tiriel remarqua enfin que la créature de tête, un homme dans son ancienne vie, parlait, le bas-parler de Lordaeron.

-Nous ne vous voulons pas de mal, nous sommes libres de toute emprise, ne nous attaquez pas.

La consternation se peignit sur les visages des quatre jeunes hommes. Cette troupe mort-vivante faisait-elle partie de ce que les rapports désignait comme « les Réprouvés », soit disant indépendants et en rébellion contre la Liche? Boucliers en avant, lame à l'arrêt, ils regardaient ainsi les morts. L'homme de tête reprit la parole, les touffes de cheveux grisonnants s'accrochant désespérément à son crâne flottant mollement au vent, ses orbites creusées accueillant des yeux morts qui se promenaient sur eux tour à tour.

-L'Aube d'Argent nous accepte, dans la Lumière nous marchons encore. Nous n'approcherons pas plus, ne vous inquiétez pas. Nous vous avons vu arriver et venions vous proposer assistance, si vous en avez be...

Alors que le regard du moribond se posait sur les artefacts disposés par Tiriel, la situation devint tendue, avant de tourner au surréaliste. Revenant river ses yeux écarquillés dans ceux de Tiriel, l'homme fit un pas hésitant en avant, sa main se tendant. Un vivant aurait surement eu les yeux humides, mais les siens en semblaient incapable désormais. Les paladins, d'un bloc, s'interposèrent. En cas de combat, l'issue était incertaine. Les morts étaient à peine plus nombreux qu'eux, une demi-douzaine, mais ne semblaient pas décérébrés comme les marionnettes habituelles. L'homme parla à nouveau, balbutiant.

-...T... Tiriel?

Les morts derrière cet homme bougèrent, mal à l'aise, alors qu'une femme faisait un pas en avant, main plaquée sur la bouche. L'esprit du jeune homme était bloqué, par l'horreur. Ça ne pouvait être vrai.

-Fils?.. Lumière...Tu as réussi, tu es paladin...
-... Subterfuge.

Seul ce mot parvenait à sortir de la bouche du jeune chevalier, en boucle, murmuré.

-Non mon fils, c'est moi...
-Mon enfant... Lumière que j'aurais souhaité que ce jour n'arrive pas...

La femme parlait, et si sa voix était rauque et cassée, elle n'en gardait pas moins des accents qui forçaient leur chemin au creux de sa mémoire. Le point de rupture était proche, ses pensées qui tournaient en rond peu avant ne tournaient simplement plus. Il était à l'arrêt, son cœur s'emplissant peu à peu d'une colère noire. Lorsqu'enfin sa voix se fit plus forte, un seul autre mot parvenait enfin à passer à travers ses babines retroussées.

-... Démons.

***

Le noir. Complet, total. Et la douleur. Il avait encore été blessé, visiblement, et les soins de ses frères avaient fait leur travail, ne laissant qu'une douleur rémanente dans ses côtes et son bras. Il ouvrit les yeux péniblement sur la toile d'une tente d'infirmerie, au dessus de lui. A son chevet, un prêtre de terrain, son médecin, de façon visible. L'homme portait les couleurs de l'Aube d'Argent sous son tablier de fonction, ce dernier maculé de traces de sang séché.

-Doucement fils, prenez votre temps.

La voix apaisante de l'homme, d'un age avancé, et sa main ferme, le forçat à se rallonger et à refermer les yeux un instant. Quelque chose le gênait. Relevant la tête, Tiriel posa le regard sur ses propres mains. Du sang, dessus aussi. Et sur son armure, posée à côté de son brancard. Et un éclair, une douleur dans son crâne. Des images se superposaient à la réalité, devant ses yeux.

Ses mains, gantelées, tenaient son épée sanctifiée, la poignée du glaive trop courte pour ses deux mains. Il frappait, dans la masse. La chair pourrie explosait, des voix criaient. Des voix rauques et déjà mortes, et d'autres, plus puissantes, plus vivantes. Toutes lui demandaient d'arrêter. Son corps, ses mains, étaient nimbées d'un halo de lumière. De Lumière rouge et flamboyante. Il abattait son office sans discontinuer. Deux mains sur son bras, un échange de paroles confuses, puis un bruit résonnant, comme un carillon, un craquement métallique.

Tiriel secoua la tête, revenant au présent. Les images semblaient irréelles, comme dans un rêve. Le prêtre à ses cotés fronçait les sourcils d'un air soucieux. Le jeune homme laissa retomber sa tête sur son oreiller.

-Allons paladin, n'en faites pas trop, vous allez avoir des vertiges encore un moment.
-Ce ne sont pas des... Mon père, qu'est-il arrivé aux autres?
-Les autres?... Mon fils,de ce que j'ai compris, lorsque vous et vos compagnons n'êtes pas revenus, votre capitaine à fait envoyer d'autres frères vous chercher... Vous êtes le seul qu'ils ont ramené.

Les morts les avaient attaqués. Que ce soit pour le compte de la Horde, ou un subterfuge du Fléau, ce qui lui semblait bien plus probable, ils les avaient attaqués. C'était la seule explication.

-Je souhaiterais voir un des frères qui m'a ramené, mon père, je veux savoir comment ils m'ont trouvé. Dans quelles conditions, savoir comment mes frères...

Sentant la voix du jeune blessé se casser, le prêtre se leva avec un sourire paternel en acquiesçant, et sorti. Tiriel n'eut pas longtemps à attendre avant que les rabats ne s'ouvrent à nouveau, dévoilant Cornélius Page, un autre jeune promu comme lui, qui lui souriait timidement.

-Content de te voir réveillé, frère. Comment te sens-tu?
-Je ne sais pas... J'aimerais que tu me dise... J'aimerais savoir dans quel état vous m'avez trouvé et comment étaient les lieux.

Le visage de son camarade s'assombrit, alors qu'il opinait, visiblement à contre-cœur.

-Vous étiez tous à terre. Au début nous avons cru que vous étiez tous morts, avant de t'entendre respirer. Il y avait beaucoup de morts-vivants à terre aussi, renvoyés à leur état normal et statique.

-Combien?
-Six, il me semble. Tous fracassés, vous vous étiez bien défendus.
-Et les autres?.. Denerias?
-Je suis désolé Tiriel, je sais que vous étiez bons camarades... Il a eu moins de dextérité que toi, ils ne lui ont pas fait de quartier.

Un autre éclair, une autre douleur dans le crâne de Tiriel, alors que les images défilaient à nouveau devant ses yeux éveillés. La main venait de se poser sur son bras, alors qu'il frappait les cadavres réanimés. La conversation n'était plus confuse, mais limpide. Denerias le suppliait d'arrêter, une expression horrifiée sur le visage. Les morts-vivants étaient à terre depuis un moment. Un voile rouge devant les yeux, Tiriel voyait son camarade comme déformé.

-Pas de compromis, pas de pitié pour le Mal et le Fléau.

La voix parvenait déformée à ses oreilles, grondante. Sa voix.

-Tiriel, ce n'est pas de la pitié, mais ils sont à terre, tu n'as plus besoin de...
-Toute pitié est faiblesse, et la faiblesse est trahison.

Sa lame s'abattit à nouveau, dans un craquement métallique, l'armure tintant sous l'impact de l'épée.

S'agrippant à son matelas de toutes les pauvres forces qu'il lui restait, Tiriel observait son estomac se vider pitoyablement sur le sol, des larmes de douleur autant physique que spirituelle venant diluer le contenu de ses entrailles dans ses soubresauts hoquetants. Cornélius le tenait par les épaules, appelant le prêtre. Tiriel n'y faisait plus attention. Il n'avait pas fait ça. Il était victime d'une malédiction, ou d'un quelconque sortilège du Fléau. Mais lui était Paladin. Respect, Ténacité, Compassion. Compassion. Il ne pouvait pas avoir fait cela à Denerias, ni aux autres.

Il ne l'avait pas fait. Mais il trouverait qui. La froide résolution l'aida à se calmer. Mais tout était différent désormais. Une partie de son propre esprit lui était fermée, comme une autre personne se terrant en son for intérieur. Une voix s'en échappait. Une voix déformée, grondante.

Qu'ils brulent.

Tiriel
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